Archives de Tag: Enfance

En passant

mai68jpg-8dd8dd8-d12ea

C’est un petit peu flou.

J’avais presque 7 ans.

Flou mais j’ai quelques flashs.

Nous habitions le quartier latin depuis janvier 1967.

Un peu plus d’un an.

Nous étions donc en mai 68 en plein quartier latin.

J’aimais aller à l’école parce que le matin on voyait les voitures qui avaient été retournées pendant la nuit avec un drôle de toit enfoncé.

Et puis celles qui avaient brûlé. Toujours d’une couleur noire et orange.

Et puis à l’école on jouait tout le temps aux étudiants et aux CRS.

Malgré l’interdiction, je descendais souvent dans la rue pour guetter les manifestations.

Et puis dès que ça bougeait, on prévenait tous les habitants de l’immeuble pour qu’ils rentrent leurs voitures. Il n’y avait pas de parking et les voitures s’entassaient dans les cours et le jardin.

Une nuit, mon frère m’a réveillé. Il y avait un vacarme fou. La lumière n’était pas régulière. Il m’a dit « On est tout seuls. Papa et maman ne sont pas là ».

Il avait beau avoir 3 ans de plus que moi, c’était un grand trouillard.

Donc, nous sommes sortis sur le pallier. Il y avait plein de monde.

Des blessés. Il fallait passer entre les gens pour descendre.

« Ils doivent être en train de manifester! »

Je voulais sortir mais mon frère ne voulait pas. La porte sur la rue s’est ouverte.

Des blessés sont entrés. Derrière, je revois les flammes et les gens courir dans tous les sens. Je me souviens que nous avons du être attrapés par une voisine.

Je me revois bien chez elle avec mes parents venant nous récupérer.

J’étais fier. Ils avaient un foulard sur le nez et la bouche, comme les cow-boys.

Et puis des brassards de la croix rouge. Une infirmerie avait été installée dans l’immeuble.

Le lendemain sans doute, ma mère nous accompagne à l’école.

Il n’y avait personne. Plus de rue. Des barricades qui fumaient.

Et l’odeur de lacrymogènes qui piquait le nez et les yeux.

L’école était fermée. Nous avons été expédiés dans l’Allier.

Ça devenait compliqué à Paris.

Mais nous avons un peu vécu ce qui allait changer les 20 prochaines années.

69 – 1